la bataille d'Ypres

La bataille d’Ypres (Belgique)- première attaque aux gaz -Avril 1915- où est mort Auguste le Digarcher

. Dans la 87ème division, le 73ème RIT occupait les tranchées qui, du pont de Steenstraat par le bois triangulaire et Langemarck vont vers Boesinghe. 

 " Tout à coup, vers 17h40, un nuage verdâtre, lourd, étrange s’échappe des lignes ennemies et s’avance vers Boesinghe, vers le bois triangulaire. Presque aussitôt, nos postes de 1ères lignes se sentent atteints d’un mal extraordinaire. C’est comme une vapeur suffocante qui arrête la respiration, donne la nausée, vous fait défaillir. Et cela pénètre partout, dans la tranchée, dans les abris. C’est le premier essai d’attaque par les gaz asphyxiants. Surprise terrible. En même temps la fusillade éclate, nourrie et les obus tombent de partout. On essaie de se replier à travers champs ; beaucoup tombent anéantis, les jambes fléchissent et le nuage implacable poursuit. Il faut trouver le passage de réseaux de fils de fer, balles et obus achèvent ce que les gaz ont commencé. Le 2ème bataillon, le plus exposé, le premier atteint et tourné avait disparu tout entier. Pertes : 14 officiers-70 sous-officiers 842 caporaux et soldats ». (extrait du Journal de marche –SCHAT Vincennes)

Témoignage d’un soldat britannique qui se trouvait en réserve au Nord-est d’Ypres : « ..Un mur vivant de brouillard vert, d’environ 1m20 de haut, s’avance vers les lignes françaises sur une profondeur d’environ 180 mètres. Le mur de fumée devenant de plus en plus haut, tout le secteur disparaît bientôt…Bientôt, nous entendons d’étranges cris venir du nuage vert. Les cris deviennent de plus en plus faibles et incohérents .puis des masses de soldats titubent hors du nuage et s’effondrent .La plupart ne sont pas blessés mais ils ont le visage marqué par des expressions de terreur. Ces épaves qui se replient étaient parmi les meilleurs soldats du monde ; leur sang-froid et leur courage étaient presque légendaires. A présent ils chancellent comme des ivrognes. »

Témoignage du Général Mordacq « Partout des fuyards, hagards, la capote enlevée ou largement ouverte, la cravate arrachée, courant comme des fous, allant au hasard, demandant de l’eau à grands cris, crachant du sang, quelques-uns même roulant à terre en faisant des efforts désespérés pour respirer..Jamais il ne m’avait été donné de voir un spectacle semblable, une telle débandade. »

Les récits consacrés à la 87ème division territoriale, composée de bretons et de normands, sont rares. Même le général Mordacq, dans son livre « le drame de l’Yser » cite plus souvent les grenadiers belges que les Territoriaux. Or, ce sont bien ces derniers qui ont subi l’attaque aux gaz. La 173ème brigade est littéralement détruite par le nuage jaune vert de chlore.(Yves Buffetaut-Ysec)

Le chlore, ce gaz suffocant, fut le premier toxique utilisé massivement ; ce gaz se transformait en acide chlorhydrique au contact des voies respiratoires. Les attaquants allemands portaient des masques de simples enveloppes de tulle rectangulaires imbibées d’une solution neutralisante. Les français n’en furent dotés qu’un mois plus tard. Ce n’est qu’en février 1916 que de vrais masques à gaz furent donnés aux soldats. Cela n’empêcha pas d’autres hécatombes, les chimistes perfectionnant en permanence l’efficacité des gaz jusqu’à la fameuse Ypérite utilisée par les allemands à partir de juillet 1917.

L’attaque cependant n’aurait pas dû surprendre à ce point le commandement : depuis des semaines deux régiments de pionniers allemands, spécialement entraînés, avaient installés des milliers de bonbonnes enterrées debout par groupe de 20.Un tel travail n’avait pu se faire dans une discrétion absolue ; dés la fin mars des pionniers allemands faits prisonniers avaient parlé du stockage des bouteilles de gaz. A la mi-avril, un déserteur avait donné un témoignage précis..Hélas, ces renseignements ne furent pas exploités ! Pour les troupes française de première ligne : deux régiments d’infanterie territoriale et un régiment d’algériens, dépourvus de tout moyen de protection et ignorant même les réflexes les plus élémentaires comme l’application d’un mouchoir humide sur le visage, la surprise fut totale et meurtrière.

Le général Deimling, commandant du xvème corps d’armée allemand, chargé de l’opération s’est ultérieurement justifié ainsi : « Je dois reconnaître que la mission d’empoisonner l’ennemi comme on empoisonne des rats me fit l’effet qu’elle doit faire à tout soldat honnête : elle me dégoûta. Mais la guerre est un cas de légitime défense et ne connaît pas de loi. Il en sera ainsi tant qu’il y aura des guerres. »

Il faut savoir que les alliés, après avoir clamé leur indignation, utiliseront ce procédé à leur tour et l’efficacité des gaz et parallèlement des masques à gaz sera améliorée tout au long de la guerre.


  Le beau calvaire breton érigé dans l’ancien secteur de la 87ème division territoriale, entre Pickelm et      Boesinghe, en mémoire des régiments bretons de Vitré, Guingamp et Saint-Brieuc.

 

 2009 : nous sommes allés à Ypres et sur le lieu de cette bataille. Tout est bien changé évidemment..mais on peut tout de même situer assez précisément là ou se trouvait le 73ème RIT et la 2ème compagnie :entre l’écluse d’Het-Sas et le bois triangulaire : en première ligne de front.

Le monument élevé par les bretons est toujours là ; un plan sur plaque de cuivre précise bien les positions.

Les nombreux cimetières militaires implantés dans ce secteur témoignent de l’horreur que connu ce secteur du front où les offensives allemandes et alliés se se sont succédées  jusqu’à la bataille d’Avril 1918 où le terrain perdu fut reconqui et la frontière allemande dépassée.